Marine Coré Baillais, La Pâtisserie Numérique

Autor: David Rodríguez
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8 décembre 2021

La fabrication additive s'est avérée avoir une grande qualité : la versatilité pour atteindre une variété de marchés offrant des solutions et de nouvelles applications qui étaient auparavant impensables. L'industrie alimentaire ne fait pas exception. Bien que l'industrie traditionnelle soit loin d'être le principal adopteur de cette technologie, l'innovation qu'elle peut apporter à ce secteur est également importante.

Un bon exemple est La Pâtisserie Numérique [1], une start-up créée en 2019 en région parisienne et dirigée par Marine Coré Baillais[2]. Nous lui avons parlé de l'état de l'impression 3D dans l'alimentation, du développement de sa machine et de la place de cette technologie dans les cuisines professionnelles.

De l'industrie à la cuisine

TSL - Quel est votre parcours dans le domaine de la fabrication additive?

Marine - Notamment chez Sculpteo, où j'ai participé à l'apport de solutions innovantes de fabrication additive à des clients industriels. Chaque client est unique, tout comme ses besoins en matière de fabrication. Une grande partie de mon travail consistait donc à les écouter et à les comprendre. Un travail qui m'a permis de découvrir le tissu qui compose le domaine de l'impression 3D dans de nombreux secteurs.

D'où vient le projet de La Pâtisserie Numérique?

Bien que le secteur alimentaire ne fasse pas partie des secteurs dans lesquels j'ai travaillé en profondeur, j'ai détecté qu'il y avait des possibilités d'amélioration et beaucoup d’opportunités. Après plus de sept ans chez Sculpteo, j'ai décidé de donner une nouvelle orientation à ma carrière pour combiner les connaissances acquises dans le domaine de la fabrication additive avec mon autre passion : la pâtisserie.

La première étape a été de passer le CAP (Certificat Aptitude Professionnelle) à l'École de Boulangerie et de Pâtisserie de Paris en 2018 afin de pouvoir travailler en tant que pâtissière et entrer dans le monde de la pâtisserie. Bien que pour moi la formation ne visait pas à exercer directement le métier, elle m'a permis d'acquérir des connaissances et surtout d'accéder aux cuisines et aux boulangeries où se trouvent les chefs avec lesquels je souhaite développer mes idées.

Aujourd'hui, nous sommes une équipe de 7 personnes combinant des compétences en mécanique, logiciel et biochimie pour développer des solutions innovantes dans le secteur alimentaire.

équipe de La Pâtisserie Numérique. Via La Pâtisserie Numérique

Développement d'une technologie propre

Quels sont vos développements jusqu'à présent?

Le premier et le plus "simple" est Cakewalk 3D [3], un kit permettant de transformer une imprimante de bureau en imprimante alimentaire. Compatible avec la plupart des imprimantes FDM, notre kit permet d'extruder différents aliments et de faire les premiers pas dans le domaine de l'impression 3D alimentaire. Notre application est basée sur une vis sans fin, car la méthode du piston n'est pas idéale pour les applications alimentaires.

Plus tard, grâce à nos connaissances, nos succès et surtout nos échecs, nous avons décidé de développer notre propre slicer spécifique pour l'impression alimentaire. Nous avons constaté que les logiciels n'étaient pas adaptés aux besoins de notre application.

Notre matériau n'est pas un matériau standard, comme un plastique par exemple, avec des propriétés bien définies qui nous permettent de paramétrer plus facilement l'impression. Notre matériau est visqueux, fait d'un mélange de plusieurs ingrédients et avec des propriétés qui peuvent varier énormément car chaque cuisinier aura sa propre recette.

"Nous avons démarré avec deux propositions : un kit pour adapter une FDM à l'impression alimentaire et l'adaptation d’un logiciel de slicing à usage spécifiquement alimentaire. Aujourd'hui, nous sommes déjà en train de développer notre propre machine"

Grâce au soutien de l'Université de Technologie de Troyes, nous avons développé ce logiciel qui répond aux spécificités de notre application, notamment aux problèmes de rétraction et de mouvements de non-impression [4].

Ces deux cas sont à la base du projet le plus important sur lequel nous travaillons : notre propre machine d'impression alimentaire.

Où en est le développement de votre propre machine?

Nous sommes occupés dans divers domaines, car une tâche de ce calibre requiert l'attention de nombreux détails. Avoir le soutien de grands chefs aide beaucoup, car ce sont eux qui connaissent les goûts des convives et seront les futurs utilisateurs de l'appareil.

Le plus remarquable est peut-être le fait que l'objectif est clair: faciliter le travail du chef sans affecter le goût. Le fait que le plat soit imprimé en 3D ne peut doit pas affecter le goût. C'est pourquoi nous avons conçu un appareil qui imprime sans avoir besoin d'ajouter des additifs et qui est flexible et polyvalent en termes de recettes, sans limiter le processus créatif intrinsèque à la haute cuisine.

C'est un défi car, j'insiste, contrairement aux machines technologiques existantes, nous proposons souhaitons que tout chef professionnel puisse travailler avec n'importe quelle création qui lui vient à l'esprit, ce qui signifie que le champ des matériaux possibles est énorme. Par exemple, même si nous proposons une recette spécifique pour la machine, si deux personnes différentes la réalisent, nous aurons inévitablement deux pâtes qui ne seront pas 100% identiques.

Projet de biscuit fait sur la machine en développement. Via La Pâtisserie Numérique.

D'autres aspects sont plus faciles à définir, comme les matériaux compatibles avec les aliments, la conformité à l'hygiène ou les dimensions, car nous nous appuyons sur les normes de cuisine existantes [5].

Nous avons encore beaucoup de travail devant nous, dont les dépôts de plusieurs brevets et nous prévoyons de le mettre sur le marché d'ici la fin de 2022.

Un domaine en plein essor

À quoi ressemble l'écosystème dans ce domaine particulier de la fabrication additive?

Ce n'est pas encore un secteur où l'offre est abondante, donc un marché assez petit et ciblé, ce qui se traduit par une faible concurrence. Les gens commencent à en parler et les chefs professionnels s'intéressent et participent à des projets comme le nôtre pour faire de la place à cette technologie dans leurs cuisines.

La bonne nouvelle est qu'il existe une grande projection. Dans ce sens, j'aimerais mettre en avant des projets intéressants comme ceux de l'espagnol Natural Machines avec sa Foodini ou du néerlandais byFlow [6].

La Foodini des Barcelonais Natural Machines. Via Natural Machines [7]

"Il y a déjà des paris intéressants dans un domaine qui a encore beaucoup de chemin à parcourir"

Que pouvons-nous attendre de l'avenir dans ce secteur?

De nouvelles approches où l'on ne se limite pas à des réalisations où la machine est un simple bras robotisé qui façonne une pâte ou un aliment, mais où l'on profite des possibilités de la fabrication additive pour proposer des expériences uniques. Imaginez que vous puissiez goûter des plats aux saveurs, aux textures ou aux formes impossibles à réaliser avec des méthodes traditionnelles.

RÉFÉRENCES

Image de couverture via La Pâtisserie Numérique

[1] La Pâtisserie Numérique

[2] Linkedin Marine

[3] Cakewalk 3D

[4] Slicer 3D

[5] Gastronorm. UNE EN 631-1. Materials and articles in contact with foodstuffs - Catering containers - Part 1: Dimensions of containers

[6] byFlow

[7] Natural Machines

David Rodríguez

3D Printing professional. Mining & Energy Engineer B.Sc. Industrial Engineer M.Sc. Believe to make.

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